La lutte contre le harcèlement ne s’arrête pas aux portes de l’école
Le 9 novembre prochain aura lieu la Journée nationale de lutte contre le harcèlement. Elle sera l’occasion d’un éclairage particulier sur ce sujet sensible, qui touche directement nos enfants et est source d’inquiétude pour les familles. Si cela participe de la nécessaire prise de conscience collective, il est aussi certain qu’une seule journée ne saurait suffire. Car la lutte contre le harcèlement, a fortiori scolaire, est l’affaire de tous, chaque jour de l’année, et doit se mener en tout lieu.
La lutte contre le harcèlement ne doit pas s’arrêter aux portes de l’école. Si cette dernière est le lieu d’expression principal de ce mal qui transparaît dans les relations des plus jeunes, il faut s’intéresser aux environnements où se forment les prédispositions et conditionnements qui déclenchent ces comportements.
La conséquence d’une vision ultra-violente de la société
Car le harcèlement n’est pas un instinct inhérent à la nature humaine, dont nos enfants seraient naturellement imprégnés. Il est le reflet de la violence de notre société, qui façonne nos représentations et qui fait inopportunément surface chez les plus innocents. Il s’agit d’un problème plus large que ce qu’on laisse entendre, qui dépasse les cadres scolaires ou professionnels, et qui relève de la manière dont nous mettons en scène les événements et les relations qui construisent notre rapport à l’autre.
Dans nos médias, dans nos films préférés, sur les réseaux sociaux et jusque dans nos relations interpersonnelles ; quel que soit le format, nous laissons à la violence une place de choix, et nous l’exacerbons pour la laisser ressurgir sous diverses formes. 15 minutes devant les chaînes d’information en continu suffisent pour constater à quel point les conflits armés, les manifestations violentes, animosités verbales et autres faits divers sanglants monopolisent notre attention, et représente la majorité du contenu que nous absorbons. La violence nous effraie, certes, nous horrifie et nous désole, mais nous lui vouons aussi une sorte de fascination irrationnelle, nourrie par un flux continu de contenus à caractère brutal. Nous ne l’approuvons pas, mais nous ne parvenons pas à en détourner le regard, et nous la laissons imprégner nos quotidiens et nos modes de vie.
Les jeunes apprennent par l’exemple
Plutôt que de blâmer les jeunes, il ne faut pas oublier que nous leur donnons l’exemple. Par mimétisme et sous l’influence de notre propre propension à la surreprésentation de la violence, certains jeunes finissent par reproduire des systèmes d’oppression et de brutalité dans leurs relations, sans se rendre compte de l’impact psychologique dévastateur de leurs comportements sur leurs camarades. L’école, lieu de partage et d’apprentissage de la vie en commun, devient alors pour certains une source d’angoisse et de terreur ; c’est notre devoir à tous de tout faire pour éviter cela. Le problème du harcèlement scolaire dépasse le simple cadre de nos établissements, il n’est pas du seul ressort de l’Education nationale : c’est aussi un problème social, qui doit être abordé dans toutes les sphères, qu’elles soient publiques ou privées. En complément du travail de sensibilisation effectué dans les établissements scolaires, une réflexion s’impose au sein même des foyers sur la place de la violence dans l’environnement de l’enfant et sur sa lucidité quant à l’impact de ses actes dans ses relations sociales.
Cette déconstruction des stéréotypes et préjugés exacerbant la violence chez les jeunes et les phénomènes de stigmatisation et autres effets de groupes, nous y prenons toute notre part à travers de nombreuses initiatives départementales au sein des collèges publics. Nous menons d’ailleurs ces actions au-delà de nos compétences dévolues par la loi et portant strictement sur les bâtiments, les personnels techniques et la restauration.
Nous apportons ainsi notre pierre à l’édifice des remparts qui doivent protéger nos jeunes, à cette démarche collective qui pousse à réfléchir, à faciliter la libération de la parole de celles et ceux qui étouffent de ne savoir comment dire stop !
Cela, nous le faisons à travers les travaux du Conseil départemental des jeunes et le relais que constitue l’ensemble de ses membres. Nous le faisons à travers notre Convention éducative et ses parcours construits en partenariat avec l’Education nationale. Nous le faisons aussi grâce à l’intervention de nos partenaires du réseau de l’éducation populaire au sein des établissements. Nous le faisons encore lorsque nous parvenons à faire chanter ensemble 1000 collégien·e·s chaque année pour Chœur en scène…
Ces actions viennent compléter les initiatives nationales dont on peut souligner le changement de paradigme récent, en intégrant le caractère systémique des violences commises par les « harceleurs » sur les « harcelés ».
Pour lutter contre le harcèlement scolaire, le cadre familial, le cadre sociétal et le cadre scolaire doivent s’accorder et se compléter, afin de sensibiliser nos jeunes et de limiter la place de la violence dans leur quotidien. Afin de simplement les protéger.